Tendre colère part d’un état de sidération face au monde. Que faire lorsque le sens n’est plus ? Lorsque la destruction du vivant et l’errance de l’humanité semblent à l’œuvre, inéluctables ?
Se révolter, s’unir, se consoler, partir en guerre : autant de voies qui s’offrent à l’individu lorsqu’il tourne son désarroi vers le groupe. Alors naissent ces alchimies troublantes dans lesquelles les volontés individuelles s’abandonnent au collectif, se grisent de sa puissance fraternelle et consolatrice, se laissent emporter au‑delà d’elles-mêmes pour trouver encore une raison d’être. Quitte à se battre contre des moulins à vent.
Tendre colère est une invitation à agir, à se retrouver, à se réinventer ensemble. Une pièce puissante, adressée à chacun d’entre nous par dix interprètes virtuoses.
Ils ont transmis de la joie à toute la salle lors de l’inauguration du Festival Suresnes Cités Danse, mi janvier. Les frères Christian et François Ben Aïm, danseurs et chorégraphes alliés depuis l’aube des années 2000, y ont proposé leur dernière création, Tendre Colère, comme un nouvel élan. Car ils osent enfin le groupe et la danse d’ensemble, leur dizaine d’interprètes envahissant la scène de franche et énergique façon. Et l’humour – qualité tout de même rare dans la danse contemporaine – n’y manque pas.
Emmanuelle Bouchez – Télérama TTT
Dans sa capacité à connecter l’imaginaire de chacun avec une danse généreuse, Tendre colère affirme le geste humaniste de Christian et François Ben Aïm.
Rosita Boisseau – Le Monde
Christian et François Ben Aïm
Depuis plus de vingt ans, Christian et François Ben Aïm construisent une oeuvre riche de poésie et d’exigence, de lien fraternel et de singularité.
À l’issue d’une formation pluridisciplinaire mêlant danse, théâtre physique et cirque, chacun suit son parcours d’interprète, puis les deux frères se retrouvent en 1997. Depuis, ils créent près d’une trentaine de pièces qui puisent leur inspiration à des sources littéraires, musicales, picturales, et s’emploient à mêler les disciplines artistiques sur scène : En plein coeur (2006), Valse en trois temps (2010), L’Ogresse des archives et son chien (2011), La Légèreté des tempêtes (2014), Brûlent nos coeurs insoumis (2017), Mirages — les âmes boréales (2018), Arise (2019), FACÉTIES (2021).
Marquée par une énergie sans concession, convoquant chez l’interprète un rapport intime au mouvement, la danse des frères Ben Aïm propose, au-delà d’un discours, une expérience, une « traversée » que l’interprète effectue sous nos yeux, qu’il vit à chaque fois avec la sincérité d’une présence pleine et entière.
En explorant la fraternité, le désir ou l’émancipation dans leur richesse contradictoire, en interrogeant les normes dans leur ambivalence, ils abordent chaque pièce comme un exercice de déséquilibre ; une expérience dont l’enjeu est de s’approcher du vide, perçu comme l’endroit d’une ouverture renouvelée.
Par un subtil effet d’empathie et de contamination, les chorégraphes nous entraînent dans un monde où rien n’est stable, où tout est l’objet d’un questionnement poétique et sensible, où les vérités se troublent et se réinventent ; un monde à interroger ensemble.